Déclaration contre le travestissement (1975)
Une très bonne articulation d'un aspect du problème
Le magazine DRAG: The International Transvestite Quarterly (DRAG : La revue trimestrielle internationale des travestis), publié entre 1971 et 1983, a été créé par Lee Greer Brewster (1943-2000), un homme qui se travestissait, qui se disait « drag queen » ou « travesti », voire « female impersonator » (« imitateur de femme »), et que les militants trans qualifient aujourd’hui de « femme trans ». En 1969, Brewster a ouvert une boutique appelée « Mardi Gras » à New York dans laquelle il vendait toutes sortes d’accessoires pour les hommes qui veulent se travestir (perruques, talons, faux seins, etc.).
Dans le numéro 18 du cinquième volume du magazine DRAG, paru en 1975, Brewster et ses comparses ont reproduit, mais, bien sûr, en vue de la dénoncer, une excellente « Déclaration contre le travestissement », rédigée et distribuée par un collectif de lesbiennes et de gays. Je me suis permis de la traduire. Voici donc.
Déclaration contre le travestissement :
(Nous soutenons les droits de tous les individus, tant que ces droits ne nuisent pas aux autres. Cependant, nous protestons fermement contre l'inclusion de porte-parole et d'artistes travestis dans les rassemblements et manifestations gays pour les raisons suivantes :
1. En tant que lesbiennes, nous ne pouvons considérer le travestissement ou les « drag queens » autrement que comme une parodie et une moquerie des femmes, une projection et une transposition dans la vie gay du mépris que manifeste l'homme hétérosexuel ainsi que de ses attitudes sexistes et suprématistes.
2. Les féministes lesbiennes ont obtenu le soutien du mouvement gay de la part de leurs sœurs hétérosexuelles du mouvement féministe. Ces femmes, tout en soutenant les droits des homosexuels, sont offensées par les moqueries dont elles font l'objet de la part des hommes qui endossent le costume-parodie de l'hétérosexualité. […]
3. En tant que gays, notre orientation sexuelle et notre préférence affective vont vers d'autres hommes. Nos objectifs, nos espoirs et nos amours ne sont pas représentés par des hommes jouant à être des femmes.
4. Nous devons réaliser que le travesti est une victime de la société hétérosexuelle. On a appris à ces hommes et à ces femmes que la seule façon d’accepter leur propre sexe consistait à se déguiser et à jouer le rôle du sexe opposé. Le travestissement est une affirmation indirecte du « bon ordre » de l'hétérosexualité, aux dépens et à l'encontre du mode de vie positif et alternatif des homosexuels et des lesbiennes qui s'affirment.
5. Le travestissement opprime les hommes gays en perpétuant les stéréotypes de la société à notre égard. Ce sont les représentations que nous voyons dans les films, les bulletins d'information et les magazines. Notre oppression doit cesser au sein de notre communauté gay avant que nous puissions espérer qu’elle cesse dans l'esprit des autres.
6. Le travestissement est aussi bien pratiqué par des hétérosexuels que par des homosexuels. Pour cette raison, il ne s'agit pas d'une préoccupation ou d'une priorité spécifiquement gay. Il ne faut donc pas en faire la promotion lors des rassemblements et des manifestations.
Nous faisons une distinction encore plus nette en ce qui concerne les transsexuels. Ils ne s'identifient même pas à la libération gay, mais adoptent complètement des rôles, des attitudes et des modes de vie hétérosexuels. Ils sont eux-mêmes les premiers à souligner qu'ils ne sont pas gays.
7. Le travestissement est un vestige du ghetto et le premier symbole de l’oppression des gays. Nous, dans le mouvement gay, avons entrepris un processus d’autodéfinition et d’auto-acceptation. Le travestissement va à l'encontre de ces deux objectifs, d'abord en imposant une définition extérieure, ensuite en masquant notre vrai moi et celui des autres. Lorsque nous faisons notre coming-out, nous devons laisser derrière nous les oripeaux du placard ! La fierté gaie commence par l'acceptation de soi en tant que personne réelle et naturelle, sans l'imposture d'un déguisement de « drag ».
Nous protestons vigoureusement contre l'inclusion de porte-parole et d'artistes travestis dans les rassemblements et les manifestations gays.
Collectif Lesbian Rising & Gay Men's Alliance
Hunter College
695 Park Avenue
New York, N Y. 10021
Il manquait dans leur analyse, la compréhension des motivations des hétéros travelos qu'ils et elles critiquent. Tout s'éclaire une fois que l'on sait que le "sexuel", dans "travestis sexuels" (et transsexuels, et autogynéphiles, tous synonymes), signifie "érotique"/"excitation sexuelle". Ces hommes qui se disent femmes trans ne sont pas des "gays refoulés", ce sont pour la majorité des autogynéphiles hétérosexuels. Se travestir en femme les fait bander.