Des militants trans s'en prennent à une pionnière du féminisme latino-américain
Un autre coup d'éclat des idiots utiles du patriarcat
Hier, en Espagne, à l’université Complutense de Madrid, une célèbre anthropologue féministe mexicaine, Marcela Lagarde, aujourd’hui âgée de 75 ans, avait été invitée à participer à une conférence sur l’histoire du féminisme et de la violence à l’encontre des femmes.
Mais alors que Marcela Lagarde parlait de l'effacement historique dont les femmes ont été victimes au cours des siècles, des mécanismes que le patriarcat a employé et emploie pour effacer les femmes et de la nécessité de reconstituer une généalogie féministe, des militants trans se sont mis à vociférer dans un mégaphone pour interrompre la présentation.
Sans s'en rendre compte, ces imbéciles misogynes ont ainsi illustré le phénomène que dénonce Lagarde.
Et s'ils s'en sont pris à elle, c'est parce qu'ils considèrent que Marcela Lagarde est une « TERF » (une « féministe radicale qui exclue les trans »), autrement dit qu’elle est « transphobe ». Entre autres slogans lumineux, les militants trans ont hurlé : « Des femmes avec des pénis, des femmes avec des vagins, il y a beaucoup plus de femmes que vous ne pouvez l'imaginer. »
Lagarde, qui est une des figures les plus importantes du féminisme latino-américain, est restée calme tout au long des hostilités. La conférence a finalement dû être déplacée dans une salle plus petite et se tenir à huis clos.
En 2006, Marcela Lagarde a conçu le terme espagnol « feminicidio » (« féminicide »), désormais utilisé dans la législation de différents pays pour qualifier les meurtres commis contre des femmes parce qu'elles sont des femmes et parce que des institutions, au premier rang desquelles l’État, entretiennent l’impunité des violences contre les femmes. Comme elle l’écrit (voir ici) :
« Quand l’État est une partie structurelle du problème de par sa dimension patriarcale et de par son attachement à préserver cet ordre, le féminicide est un crime d’État. »
Autrement dit,
« il y a féminicide quand l’État n’accorde aucune garantie aux femmes et ne crée pas les conditions pour qu’elles vivent en sécurité dans leur communauté, leur maison, leur travail, ni même leurs lieux de divertissement. Plus encore quand les autorités ne remplissent pas efficacement leurs fonctions. C’est pour cela que le féminicide est un crime d’État. »
Lagarde a également joué un rôle moteur au Mexique dans l'élaboration de la loi générale pour l'accès des femmes à une vie sans violence (2007) et a été membre de la commission du Congrès mexicain chargée de suivre les enquêtes relatives aux féminicides. En 2009, elle a joué un rôle décisif dans le premier arrêt de la Cour interaméricaine des droits humains tenant compte des sexospécificités, rendu contre le gouvernement mexicain pour le meurtre de trois femmes à Ciudad Juárez (nord du Mexique). L'affaire, connue sous le nom de González et autres (Campo Algodonero), a marqué un tournant dans l'accès à la justice pour les victimes de féminicides au Mexique.
Marcela Lagarde reproche — à raison — au mouvement et à l’idéologie trans/queer de vouloir « éliminer les femmes en tant que sujet du féminisme ». Parce que tel est effectivement le cas.
Parmi leurs nombreuses revendications, toutes plus lunaires les unes que les autres, les militants trans et queer exigent non seulement que les femmes ne soient pas le sujet du féminisme (c’est explicitement demandé par des personnes comme Judith Butler et repris par des femmes comme Elsa Dorlin en France), mais aussi que le terme « femme » ne désigne plus les êtres humains adultes de sexe féminin. Plus généralement, ils exigent que les termes « fille », « femme », « garçon » et « homme » ne renvoient plus à la réalité matérielle du sexe, des corps sexués, mais à… rien ! Ils proposent en effet de remplacer la seule définition logique de ces termes par rien, par des tautologies, par des propositions dépourvues de sens : selon eux, est une femme quiconque dit être une femme, une fille quiconque dit être une fille, un garçon quiconque dit être un garçon, un homme quiconque dit être un homme. Cette idée se combine, chez les militants trans et queer, à l’idée selon laquelle les termes « fille », « femme », « garçon » et « homme » renvoient seulement à des sentiments, des ressentis, des « identités de genre », mais on revient à des tautologies : l’« identité de genre » femme correspondrait au « sentiment intime d’être une femme », sauf que, qu’est-ce qu’une femme ? Eh bien c’est une « identité de genre » qui correspond au « sentiment intime d’être une femme », sauf que, qu’est-ce qu’une femme ? Et ainsi de suite jusqu’à l’infini et au-delà.
Ces revendications — fondamentalement absurdes — reviennent effectivement à effacer les femmes, les femmes réelles, les êtres humains de sexe féminin, en supprimant, dans le vocabulaire et donc dans la culture, les moyens de les nommer. Il s’agit donc aussi de revendications misogynes, empreintes de mépris pour les femmes (pour les femmes et pour la raison, c’est une plongée délibérée dans le non-sens, un nihilisme).
Les militants trans ont aussi scandé « il n’y a pas de féminisme sans les femmes trans ». Ce qui signifie : « il n’y a pas de féminisme sans les hommes qui se disent femmes ». Autrement dit : « il n’y a pas de féminisme sans les hommes ». Comment font-ils pour ne pas réaliser qu’ils sont le cheval de Troie rêvé du patriarcat ? Imposer, au nom du féminisme, que le sujet du féminisme soit tout le monde et n’importe qui et que le féminisme soit un machin qui serve aussi les hommes, le patriarcat ne pourrait souhaiter mieux.
Des dizaines d'associations et de militantes du mouvement féministe ont dénoncé les agissements honteux des militants trans, profondément méprisant à l’égard du combat des femmes.